Il y a quelques semaines, je faisais part à une personne des remous émotionnels que je vivais alors et sa réponse a été : “Mais je ne comprends pas, je croyais que tu étais connectée”.
J’avoue que j’ai été très étonnée de cette réponse et n’ai pas compris ce qui pouvait pousser une personne qui travaille dans le domaine de la spiritualité à avoir une telle croyance. Ce n’est qu’aujourd’hui que j’entrevoie quelques éléments de réponses que je souhaite partager avec vous.
Le premier élément a trait à la culture française qui a peur de l’échec. En effet, j’ai constaté que dans les pays anglo-saxons, les enseignants spirituels n’ont absolument aucun problème à dire qu’ils ne vont pas bien tout le temps, qu’eux aussi sont aux prises avec leurs émotions, leurs pensées erronées, leurs blessures… alors qu’en France, les enseignants se montrent sous un jour de perfection, c’est comme si jamais, à aucun moment de leur vie, ils ne rencontraient le contraste. Nous voyons ce phénomène dans tous les domaines, l’échec est perçu très négativement en France alors qu’aux Etats-Unis, l’échec est un ingrédient essentiel à la réussite ; on préférera quelqu’un qui a échoué à quelqu’un qui n’a rien tenté. Je me souviens un jour avoir entendu un enseignant spirituel répondre à un de ses élèves, qui s’étonnait de ses difficultés, “c’est parce que j’ai reçu le Karma d’untel”. J’en suis restée bouche bée.
Le problème avec cette forme d’enseignement est qu’on laisse les apprenants imaginer qu’ils sont encore très loin du chemin car eux, ont encore des émotions négatives. On leur fait croire qu’ils ont encore tant et tant à faire pour arriver à…
“Arriver à”, voici l’un des autres éléments de cette croyance qui veut que les enseignants spirituels soient totalement maîtres de leur état émotionnel. Beaucoup s’imaginent qu’il y a une sorte de fin au chemin spirituel : la libération, le nirvana, la béatitude, la joie permanente, le bonheur absolu tout le temps… C’est se méprendre grandement sur notre nature. Cela voudrait dire que nous sommes des êtres imparfaits qui devons tendre à la perfection. Mais alors, pourquoi ces mêmes enseignants nous disent que nous sommes divins ? Ma croyance est que nous sommes divins en effet, nous sommes parfaits et que nous évoluons, grandissons, apprenons sur nous-mêmes, dans la réalité de cet espace-temps, à travers nos émotions, nos ressentis.
Pouvons-nous grandir encore, pouvons-nous continuer d’expérimenter, pouvons-nous participer à l’expansion de l’Univers si nous nous retirons nos émotions considérées comme négatives ? Pour ma part, c’est grâce à elles que j’acquiers d’avantage de compréhension, que je cherche des réponses, que j’ai de nouveaux désirs, que je me sens grandir spirituellement, que je peux être un enseignant véritablement aidant. C’est grâce à ces émotions que je vis pleinement que je peux sortir du schéma des phrases toutes faites, de la théorie, des préceptes pour entrer au cœur de l’Être. Même si elles sont parfois très difficiles, je les considère comme faisant partie intégrante de mon expérience, de mon parcours dans cette réalité. Si je vivais cette expérience uniquement pour vivre dans la perfection, la joie pure… pourquoi ne suis-je pas restée à l’état de conscience pure ?
En tant qu’enseignante, j’aime parler de mes difficultés pour ensuite partager ce qu’elles m’ont apportées, comment j’en suis sortie, aider ceux qui traversent ce que j’ai moi-même traversé.
J’aimerais tant que l’enseignement spirituel soit plus authentique. Je ne crois pas que nous soyons là pour être parfaits, en tant qu’extension de la Source, nous le sommes déjà, nous sommes ici pour permettre à la Source de s’expérimenter elle-même. Cessons de vouloir tendre vers la perfection et tendons vers la vie elle-même, dans tout ce qu’elle nous offre, que nous le considérions, du point de vue de la personnalité, l’ego, bon ou mauvais.
La peur de la souffrance pousse beaucoup à fuir dans la spiritualité au lieu de se servir de leurs expériences pour comprendre leur nature. Une émotion douloureuse, si elle est vécue en conscience, peut être une source d’évolution spirituelle comme il n’y en a pas d’autre. On peut lire tous les livres que l’on veut, écouter tous les plus grands enseignants, faire des stages tous les week-end, rien n’aura jamais l’impact d’une émotion douloureuse intégrée pleinement.
Je veux partager avec vous que je suis passée il y a quelques temps par des émotions qui m’ont propulsées tout droit dans mon enfance et ses blessures. Je les ai d’abord détestées, puis regardées, comprises, aimées et enfin transformées. Grâce à elles, j’ai fait un bond de géant dans ma compréhension spirituelle. J’ai acquis de nouvelles facultés, je me sens dans un nouvel état de conscience, je me suis défaite de très nombreuses croyances sur moi-même et sur la vie en général, je suis plus dans l’amour que je ne l’ai jamais été auparavant.
Alors oui, je me perçois comme quelqu’un de connectée et c’est justement pour cela que je ne recule jamais devant mes émotions. Je connais leur valeur pour notre expérience humaine, elle est inestimable.