Cette rentrée a été pour moi particulièrement éprouvante. Cette fois, ce n’était pas le plan émotionnel qui a été mis à l’épreuve mais le plan de la matière : le corps et l’argent.
Ce que j’aime dans l’épreuve, ou après l’épreuve, c’est la vitesse avec laquelle j’apprends. Les prises de conscience sont fulgurantes, intenses. J’ai, à chaque fois, le sentiment de passer d’un être à un autre, de littéralement changer de peau. Un nouveau moi émerge. Il est vrai que lorsque le problème surgit, j’entre d’abord en résistance, puis lorsque vient le temps de la méditation, du retrait en soi pour retirer l’essence de l’expérience, je me rends compte à quel point l’épreuve m’est bénéfique. J’entre alors en gratitude, pour ce qui est, pour moi-même, pour ceux qui m’accompagnent de leurs pensées, leur présence, leurs paroles, pour la Conscience universelle.
Au cœur de l’épreuve, je vis la séparation, je rejette ce qui est. Un peu comme celui que l’on jette à l’eau et qui se débat plutôt que de se laisser flotter pour refaire surface. Mais contrairement à la mer, la vie, plus clémente, m’accepte et patiente jusqu’à ce que je l’accepte à mon tour. Alors elle m’accompagne vers une compréhension nouvelle.
Il n’est pas, pour l’instant en tout cas, dans ma vie une épreuve que je n’aie remerciée pour tout ce qu’elle m’a apporté en terme de prises de conscience spirituelle.
Pour cela, je ne connais pas de recettes miracles. J’accepte les émotions comme elles viennent, qu’elles soient profondément négatives ou non, je les laisse vivre, grandir, me mettre à terre, me terrifier. Lorsqu’elles trouvent le chemin de ma compréhension, elles finissent par s’apaiser, alors, je refais surface. En aucun cas, je n’essaie de lutter contre elles, de me « ressaisir », de « faire avec », de « positiver »… Pourquoi ? parce que ce serait du déni face à ce que je vis profondément.
Accepter ce qui est, ne veut pas dire se forcer à accepter les événements qui nous arrivent, cela signifie concrètement accepter ce qui est : les événements, nos émotions, nos doutes, nos peurs, nos résistances. Ce sont tous ces ingrédients qui créent la réalité, notre réalité propre.
Vouloir absolument garder la tête froide parce que c’est plus spirituel, parce qu’ainsi, nous prouvons que nous avons compris, est la véritable résistance et ne permet pas de grandir spirituellement. C’est en fait souvent ce qui nous bloque spirituellement, qui fait que nous stagnons.
C’est une conversation que j’ai souvent avec des personnes qui cherchent tous les moyens pour ne pas « souffrir ». J’ai une amie qui vit une situation pénible actuellement et qui prend, pour la première fois de sa vie, des anxiolytiques tant la souffrance lui est insupportable. Oui, la souffrance est insupportable, mais elle existe, au même titre que le bonheur et elle touche absolument toute chose, tout être dans cette réalité. Pourquoi lui dénier le droit d’exister. Si elle fait partie de nos vies, c’est qu’elle y a sa place. Il y a quelques jours, je n’aurais pu écrire cela car tout ce que je voulais c’est qu’elle s’efface de ma vie. Mais aujourd’hui, je sais combien elle m’apporte. Comme tout le monde, je voudrais que ma vie ne sois faite que de joie, de rires, d’amour, de bonheur. Ces merveilleuses émotions me font accéder à une qualité d’éveil délicieux et universel… Tandis que la souffrance me plonge au cœur de l’être, m’ouvre aux autres, casse mes schémas, mes croyances, tout ce dont je ne suis pas consciente et que je trimballe dans mes énergies comme une carte de visite où serait écrit le nom d’une autre personne et à cause de laquelle je serais étonnée que les gens ne me reconnaissent pas pour ce que je suis au fond. Mon regard se fait plus doux, mon cœur plus tendre à tout ce qui est, même ce qui m’agaçait il y a quelques temps encore. La personnalité s’efface toujours un peu plus pour laisser place à l’être véritable, à la Présence.
De nouvelles qualités naissent en moi, j’en suis tellement heureuse. Je me sens encore plus proche de ma nature véritable que je ne l’étais il y a un mois encore. De nouveaux besoins prennent vie tandis que d’autres n’ont plus lieu d’être et me paraissent si superficiels d’un seul coup.
Loin de moi de faire l’apologie de la souffrance, mon propos est de témoigner que la souffrance fait partie de nos vies. Comment je le sais ? Parce qu’elle en fait partie. Oui, il est normal d’entrer en résistance, de vouloir que les événements soient différents de ce qu’ils sont, de crier, de pleurer. Mais vient – toujours – le temps de l’apaisement, et c’est ce moment‑là qui nous est précieux, à nous qui avons à cœur notre recherche spirituelle. Mon propos est que lorsqu’on se retrouve au creux de la vague, on peut se souvenir que, plus tard, lorsqu’on refera surface, il est possible qu’un nouvel être apparaisse, plus en accord avec nos envies profondes, avec notre nature, notre âme, nous. Un peu comme ceux qui reviennent d’une NDE… Ils ne sont plus jamais tout à fait pareils.