D’OÙ VIENT LA PEUR DU REJET ?
La peur du rejet est l’une de nos peurs les plus puissantes et plus profondément ancrées. Biologiquement, nous ressentons intrinsèquement le besoin d’appartenance, aussi avons-nous peur que les autres nous perçoivent de manière critique et de nous retrouver isolés, seuls. L’intensité de la peur varie selon chaque personne et son expérience du rejet dans l’enfance mais nous la ressentons tous.
Ce qu’en dit la science
De nombreuses études ont montré que les parties du cerveau activées par la douleur physique sont les mêmes que celles activées par la douleur émotionnelle ressentie après une expérience de rejet. Ce qui signifie que le cerveau traite le rejet de la même manière qu’une douleur physique.
Les implications sont énormes.
Une des premières études consacrées à ce sujet, en 2010, a révélé que les régions du cerveau activées chez les personnes à qui on a montré des images d’un ex-partenaire étaient les même que chez les personnes qui avaient été gravement brûlées par exemple.
Une autre étude a confirmé cette idée en montrant que le cerveau libère des opioïdes (des analgésiques naturels du cerveau, habituellement produites et diffusées en cas de blessures physiques) lorsque les gens se sentent rejetés par des prétendants potentiels. Cette étude était particulièrement intéressante dans la mesure où les participants étaient rejetées… dans leur imagination !
Explications : On a montré aux participants une série de photos et de profils de personnes imaginaires et on leur a demandé d’indiquer celles qui leur plaisaient le plus. Il est entendu que les participants savaient qu’il s’agissait de profil totalement imaginaires. Les chercheurs leur ont alors dit que leurs sentiments n’étaient pas réciproques, que le prétendant imaginaire ne les désirait pas. A cette annonce, les opioïdes ont été libérés par le cerveau. Donc, même si les participants savaient qu’il ne s’agissait pas d’un vrai rejet, leur cerveau réagissait à l’émotion ressentie avec des analgésiques comme s’ils avaient été physiquement blessés ! Cela signifie que le moindre rejet provoque dans notre cerveau l’alerte d’une menace potentielle pour notre survie. Une menace d’un même niveau qu’un préjudice physique.
LES CONSÉQUENCES DE LA PEUR DU REJET SUR NOS VIES
Dans notre vie d’adulte cette peur nous paralyse, elle nous empêche de donner notre opinion pour ne pas risquer d’offusquer notre interlocuteur. Elle nous empêche d’être nous-même, au cas où quelqu’un n’aimerait pas le « vrai » nous. Elle nous empêche de dire « non » à une demande pour ne pas blesser les sentiments de quelqu’un. Et, plus important encore, cette volonté d’approbation est à la base d’un état d’anxiété qui peut devenir permanent.
Notre cerveau ne supporte pas l’idée de perdre l’approbation des autres. Alors il engendre en nous la croyance que si nous ne tentons rien, nous ne pouvons pas échouer. Si n’allons pas parler aux personnes qui nous attirent, elles ne peuvent pas nous rejeter. Si nous ne montrons jamais notre « véritable » personnalité, les autres ne s’éloigneront pas de nous. Puis un jour cet évitement permanent du rejet devient si naturel, si habituel, qu’il devient inconscient. Dans certains cas, il est tellement enraciné que nous ne le remarquons même plus. Certains d’entre nous penseront simplement : « je suis comme ça » et s’accommoderont tant bien que mal de cette de leur « personnalité ».
QUELLE EST NOTRE EXPÉRIENCE RÉELLE DU REJET ?
La peur du rejet conduit à des comportements parfois irrationnel, illogique et contre productif. Certains transpirent, tremblent, évitent le contact visuel et perdent la capacité de communiquer efficacement.
Ironiquement, la peur du rejet devient souvent une sorte “prophétie auto-réalisatrice”. La confiance attire la sympathie alors que le manque de confiance en soi, inhérent à la peur du rejet, nous rend plus susceptibles d’être rejetés.
Pire encore, certaines personnes exploitent les insécurités des autres. Les personnes qui craignent d’être rejetées risquent davantage d’être manipulées. Les manipulateurs sont généralement charmants, charmeurs et peuvent se montrer réellement attentionnés. Ils savent quels mots prononcer pour qu’on leur fassent confiance. Ils savent également comment faire en sorte que les personnes craignant le rejet se sentent en permanence « au bord du précipice » en leur faisant subtilement ressentir qu’ils pourraient partir à tout moment. Étant bien entendu que le manipulateur finit par partir une fois qu’il a obtenu ce qu’il veut.
COMMENT DÉPASSER LA PEUR DU REJET ?
On ne se débarrasse pas de la peur du rejet comme on ne se débarrasse d’aucune de nos émotions.
Mais à chaque instant, à chaque expérience, nous avons la possibilité de dépasser notre peur du rejet. L’important est de reconnaître cette peur, de reconnaître son impact sur notre corps et nos pensées pour être en mesure d’agir différemment de nos habitudes. Voici quelques exercices qui feront petit à petit perdre le pouvoir que la peur du rejet à sur vous.
1. Apprenez à regarder les gens dans les yeux
Ce petit exercice est à pratiquer dans toutes sortes de situations. Rencontrer le regard d’un inconnu en marchant dans la rue, en achetant le pain, dans l’ascenseur (brrr !), avec vos collègues et chaque fois que vous rencontrez un humain !
Je remarque que bien souvent les gens qui ont peur du rejet regardent le front, la bouche, sur les côtés mais rarement dans les yeux.
Au début, cela peut être difficile, voir insurmontable, mais avec le temps, vous vous améliorerez et vous sentirez progressivement plus à l’aise et confiant. Regarder les autres dans les yeux vous fera prendre conscience qu’il n’y a pas de monstre à l’intérieur et qu’il n’y a rien à craindre. Rien d’autre que vos propres peurs en réalité.
2. Partagez quelque chose de très intime avec quelqu’un, montrez-vous vulnérable
N’avez-vous pas cette impression de parler, échanger, dire parfois des choses profondes, révéler des parties de vous et pourtant de ne jamais réellement parler de « vous » ? Le vrai vous est enfoui, terré, et le simple fait que quelqu’un puisse le voir vous fait trembler, battre le cœur, nouer l’estomac… Quelque part dans votre tête, le vrai vous est une sorte de monstre et si quelqu’un le voyait, il s’enfuirait en courant et vous seriez à jamais banni du reste de l’humanité.
Ça vous semble un peu exagéré ? Restez avec vous quelques instants et observez s’il n’y a pas quelque chose en vous qui ressemble à ça.
Alors, prenez votre courage à deux mains et tentez cette expérience :
Pensez à une chose que vous n’avez jamais dite à personne, ce peut aussi être une page de votre journal intime si vous en avez un et partagez-le avec quelqu’un. Si vous êtes encore plus courageux, vous montrez nu (physiquement nu) devant quelqu’un peut aussi être une expérience extraordinairement libératrice !
Quelle que soit la réaction de l’autre personne, vous vous rendrez compte que vous n’êtes pas mort.
Rappelez-vous que la peur du rejet vient de nos profondeurs et exprime une émotion de l’ordre de la survie. Lorsque vous commencez à rééduquer votre cerveau en lui montrant que ce que vous êtes ne vous mettra pas en danger de mort, la peur du rejet aura infiniment moins d’impact sur vous et votre comportement.
Vous restez vous, seulement une version plus forte et plus authentique de vous.
Lorsque vous ferez cette expérience, vous aurez l’impression de faire un plongeon dans le vide sans parachute, tête la première. Peut-être aurez-vous un énorme poids sur la poitrine, la nausée, mal au ventre et puis… lorsque vous vous rendrez compte que l’autre continue de vous regarder exactement comme il le faisait avant la révélation, peut-être même avec plus de profondeur dans les yeux, vous vous sentirez accepté. Un nouvel espace se libérera en vous pour laisser place à plus de vrai vous. Et quand vos secrets ne vous font plus peur, vous commencez à percevoir ce que cela fait de se sentir parfait.
La peur du rejet cesse d’être le serpent géant qui vous obligeait à rester dans votre grotte pour devenir un ver de terre que vous ne prenez pas la peine d’écraser.
3. Demandez à quelques amis de vous dire ce qu’il pense de vous et recevez-le avec ouverture
Vous pouvez le faire avec votre compagnon de vie ou des amis chers. Demandez-leur de vous dire quelque chose qui vous permettra de grandir dans la connaissance de vous-même. Ne plus avoir peur du regard ou du rejet de l’autre passe par cet exercice. Vous vous rendrez-compte que vous restez aimable aux yeux des autres malgré certains « défauts ». Si ce qui vous est dit vous met mal à l’aise, observez cet inconfort, abandonnez votre mécanisme de défense, observez ce que cela fait dans votre corps, soyez tout entier à ce que vous ressentez.
C’est le meilleur moyen d’entrer en relation avec votre peur. Selon votre réaction, vous avez le choix d’en tirer des leçons et grandir avec votre peur du rejet ou avoir mal et l’enraciner encore plus profondément.
4. Identifiez les moments où vous vous sentez effrayé ou mal à l’aise avec les autres
Vous voulez envoyer un message à la personne que vous aimez mais avez peur qu’elle vous trouve « pot de colle » ou ne vous réponde pas ? Vous avez envie de proposer un autre lieu de sortie à vos amis mais avez peur qu’ils trouvent l’idée nulle ? Vous aimeriez proposer à une personne qui vous plaît de prendre un verre mais vous êtes terrifié par une réponse négative ? Vous avez envie de dire à votre collègue que vous n’appréciez pas la façon dont elle vous parle mais vous avez peur des répercussions que cela aura ?
Il est important de comprendre quels facteurs externes, quels déclencheurs, nous rendent mal à l’aise, nous insécurisent pour pouvoir vraiment nous familiariser avec notre peur et ne plus lui laisser le pouvoir sur notre vie.
Dans ce processus de libération et de dépassement, il est important de connaître nos limites et d’être doux avec nous-mêmes. Suivez le rythme qui vous convient le mieux.
Parfois, le moment est idéal pour nous de nous mettre au défi, mais il y a d’autres moments où nous pourrions nous pousser pour les mauvaises raisons. Il est essentiel de connaître nos limites avant de les dépasser, et pour cela, nous devons nous familiariser avec notre peur et reconnaître ce qui la déclenche.
5. Identifiez les moments où vous essayez d’être quelqu’un que vous n’êtes pas – et soyez vous-même à la place
Cette étape est primordiale et vous aidera dans la gestion d’autres blessures. Le plus souvent possible, essayez de vous observer lorsque vous entrez en communication. Remarquez si vous n’êtes pas en train de construire un personnage intelligent, cool ou fun… fait d’actes exagérés et de phrases soigneusement choisies. Votre ego se sentira bien certes, mais cela ne durera pas, car vous n’êtes pas authentique. C’est bien de partager ce qu’on trouve sympa sur nous-mêmes, mais cela peut être néfaste lorsque nous le modifions ou lorsque nous l’utilisons pour cacher nos vrais sentiments et renforcer notre ego. C’est en cachant qui nous sommes vraiment, que nous commençons inconsciemment à ancrer en nous le fait que notre vrai moi n’est pas assez bien pour que nous osions le montrer.
Lorsque vous percevez ce comportement chez vous, arrêtez-vous et partagez quelque chose de plus vrai, quelque chose qui montre qui vous êtes vraiment, même si cela vous rend vulnérable.
Puis un jour, lorsque vous serez rejeté pour ce que vous êtes, la pensée qui vous viendra sera : « cool ! Nous ne sommes pas faits l’un pour l’autre, je préfère être avec des gens qui m’aiment pour ce que je suis ».
Puis un peu plus tard, vous vous rendrez compte qu’il ne s’agissait pas de rejet mais que vous et l’autre êtes tout simplement différents, vous ne vibrez pas à la même fréquence.
Et finalement, vous aurez la compréhension profonde que lorsque quelqu’un vous rejette, il raconte sa propre histoire, ses propres peurs et cela n’a rien à voir avec vous.
Et vous comprendrez alors que lorsque vous essayez d’être quelqu’un d’autre pour être accepté, c’est vous-même qui vous rejetez, pas l’autre.
Et la véritable souffrance naît lorsque nous nous rejetons nous-même.
Un grand merci de partager cet article si vous l’avez trouvé utile
ou si vous pensez qu’il peut être bénéfique à quelqu’un
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Je vous remercie pour cet article ! Je vais le partager avec ma meilleure amie, car elle a toujours eu peur du rejet. Du coup, je suis sûre qu’il lui sera bénéfique.